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22/12/2014

Pablo Néruda : La morte (La muerta, 1952)

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Si brusquement tu cesses d’exister,
Si brusquement tu ne vis plus,
Moi je vivrai.
...
Je n’ose pas,
Je n’ose pas écrire:
Si tu meurs.

Moi je vivrai.

Car là où on ne laisse pas parler un homme
Ma voix s’élève.

Là où le bâton s’abat sur les Noirs,
Je ne peux pas, moi, être mort.
Si l’on met en prison mes frères
Il faudra qu’on m’y mette aussi.

Quand la victoire,
Non ma victoire,
Mais la grande victoire
Arrivera,
Même muet je devrai parler:
Je la verrai, serais-je aveugle, s’avancer.

Mais non, pardonne-moi.
Si toi tu ne vis plus,
Si toi, ma chérie, mon amour,
Si toi
Tu meurs,
Toutes les feuilles tomberont sur ma poitrine,
Il pleuvra sur mon âme nuit et jour,
La neige brûlera mon cœur,
J’avancerai avec du froid, du feu, la mort, la neige,
Mes pieds voudront marcher vers le lieu où tu dors,
Pourtant
Je resterai vivant,
Puisque tu m’auras aimé en toutes choses
Indomptable
Et que tu sais bien, mon amour, que je ne suis pas seulement
Un homme
Mais tous les hommes.

***

Pablo Neruda (1904-1973) – Les Vers du Capitaine (Los versos del Capitán, 1952)

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